Philosophe...
J’ai aimé passionnément, sans distinctions, un bon point pour moi, et j'ai tout perdu. En fait je croyais posséder. De toute façon, me diras-tu, d'où je suis c’est normal que je me rende compte de ma vanité, rien à posséder, mais c’est d’avant dont je te parle, de mon monde en chair et en os, bobos et jouets compris. L’amour m’a fait mal, je m'en souviens.
Tout a commencé dans mon enfance : parents ignorants sur fond de claques injustes, rares caresses, en ont-ils eues, et punitions que je ne comprenais pas jusqu’à ce qu'on m’apprenne, dans la honte et la peine, toute mes infamies. Injustice, rejet, je me sentais abandonné et me promettais tout le temps de faire attention à l’amour. Réflexe conditionné. Peu importe la douleur de la punition, sa force ou son rythme, chacune a laissé sa trace indélébile. Une vie ne m'a pas suffi à tout comprendre, et j'en parle encore. Je m'étais protégé, recroquevillé dans une caverne dont je suis finalement peu sorti. Trop dur dehors. Aimer m'a fait souffrir… On m'a si souvent effacé, mon image dans leurs yeux. De toutes mes blessures naquit sournoisement la peur d’aimer, j'étais normal, je ne voulais plus avoir mal.
Pourtant, qu'auraient été mes amours sans cette peur perfide ? Voilà bien une peur dérisoire qui ne prend racine que dans les pensées d’un ego apeuré qui n’a de cesse de tout contrôler, pour se protéger. Pour aimer, il aurait fallu que je sois plus confiant, que je vive l’instant sans me demander ce que l'amour allaient me rapporter. Ainsi aurais-je pu le vivre au quotidien ! Un peu tard, n’est ce pas, pour m’en rendre compte ? Mais au moins c’est fait. D’ailleurs tout est fait, tout ça c’est du passé. Si j’avais imaginé un seul instant qu’un jour je ne serai plus vivant alors, peut être, aurais-je pu profiter de ce que je vivais sans me poser de questions. Demain vient toujours trop vite.
Mais, je sais désormais que tout devait se passer ainsi. Quand mes souvenirs défilent, je sais que tout n’était qu’amour, l'amour est tout.